Objectif 2020 : un combat mondial pour la Terre

La Jan Satyagraha, marche qui a réuni 100 000 marcheurs entre Gwalior et Delhi en 2012, a marqué une victoire sans précédent des paysans indiens dans leur lutte pour leur droit à la terre, avec la signature d’un accord en dix points avec le ministère du développement rural. Un an et demi plus tard, en mai 2014, la victoire du BJP aux élections générales et l’arrivée de Narendra Modi en tant que nouveau Premier Ministre ont remis ces avancées en cause. Ekta Parishad continue sa lutte, avec un nouvel objectif d’envergure pour 2020. 

Une Jan Satyagraha qui avait répondu aux attentes paysannes…

La marche Jan Satyagraha, initiée par le mouvement Ekta Parishad et qui a rassemblé 100 000 marcheurs indien entre Gwalior et Delhi en octobre 2012, avait abouti à un accord extrêmement positif en dix points avec le ministère du développement rural.

Cet accord promettait, entre autres avancées, la mise en place d’une réforme agraire à l’échelle nationale, la mise à disposition de terres agricoles et de terres d’habitation pour les paysans sans terre, le respect de leurs droits fonciers  et une accélération des procédures juridiques en cas de litige foncier. La nouvelle de cet accord avait été annoncée alors-même que les marcheurs atteignaient la ville d’Agra au sud de Delhi. Les joies et les célébrations qui ont suivi ont été à la hauteur des espérances.

Six mois plus tard, Ekta Parishad annonçait que 70% de cet accord avait été mis en place et que la mise en œuvre effective d’une réforme agraire était en marche. Néanmoins, en 2013 déjà, les leaders d’Ekta Parishad redoutaient les conséquences de l’élection très probable d’un Narendra Modi certes très populaire, mais aussi largement en faveur d’un développement économique rapide de son pays.

… mais dont les espoirs ont été déçus par le nouveau gouvernement en place

En avril 2014, sans grande surprise, le Bharatiya Janata Party (BJP) remporte les élections générales et son leader Narendra Modi prend la place de Manmohan Singh en tant que Premier Ministre de l’Union Indienne. Quelques mois plus tard seulement, Rajagopal, leader du mouvement Ekta Parishad, avertissait du fait que cette victoire écrasante annonçait une efficacité amoindrie des partis d’opposition et donc la formation d’une voie royale vers l’industrialisation et les investissements étrangers, priorités affichées du nouveau chef de l’Etat.

La surprise n’a cependant pas été moins grande quand, quelques mois à peine après son investiture, le nouveau gouvernement annonçait son projet de revenir sur la Loi sur l’Acquisition des Terres par le biais d’amendements facilitant toujours plus l’accaparement de terres par les grands groupes industriels. L’un de ces amendements prévoit notamment de revenir sur l’obligation, avant toute mise en œuvre d’un partenariat public/privé, de consulter et d’obtenir le consentement de 70% de la population potentiellement touchée. Il s’agit de réduire le taux de consentement à 50%, ce qui, dans un pays où la corruption fait rage, revient presque à ne pas consulter du tout la population.

Dernièrement, le gouvernement a pris un décret visant à annuler totalement les dix points de l’Accord signé en 2012 suite à la Jan Satyagraha. Pour l’instant, la question reste en suspens puisque la validation de ce décret n’aura lieu qu’à la condition d’un vote en ce sens par le Parlement de l’Union.

La lutte d’Ekta Parishad continue et s’étend jusqu’à l’opération coup de poing de 2020   

Dans ce contexte, les revendications paysannes en Inde demeurent de l’actualité la plus brûlante et les actions du mouvement Ekta Parishad sont loin de leur dernier souffle.

Ainsi s’est tenue, du 23 au 25 février derniers, une nouvelle marche baptisée la Jai Jagat (Victoire du Peuple), reliant les villes de Palwal et Delhi. Cette fois-ci, ce sont 5000 paysans sans terre, dalit et adivasi qui ont participé à la marche, malgré le froid hivernal. Bien que largement plus petite que celle de 2012, cette marche a bénéficié d’une forte couverture médiatique, favorisée notamment par le soutien de Anna Hazare, leader très populaire de la lutte anti-corruption en Inde. Ce dernier a organisé en parallèle de la marche une protestation massive dans la capitale indienne, lors de laquelle plus de 200 organisations et mouvements sociaux ainsi que des milliers de militants ont protesté contre la récente ordonnance du gouvernement.

Face à cette pression difficilement négligeable, le gouvernement indien a à nouveau initié un cycle de négociations avec Ekta Parishad. Rajagopal en parlait de manière positive en mars dernier, dans la mesure où la marche a bel et bien contribué à replacer la question de la réforme agraire à l’agenda politique. Il déclarait notamment que le gouvernement avait assuré prendre des mesures rapides en ce qui concerne les terres d’habitation des paysans sans terre, et promettait de reconstituer le Comité National sur la Réforme Agraire, déjà établi en 2012 mais dont l’activité était restée en suspens depuis lors.

Rajagopal ne niait pas néanmoins qu’il n’existait aucune garantie quant à la prise ou non du décret annulant les dix points de l’accord de 2012. Malheureusement, ce décret a effectivement été pris depuis.

Ainsi, Ekta Parishad voit ses objectifs en bien plus grands pour l’horizon 2020. Constatant que les accaparements de terres et la lutte paysanne qui s’y oppose forment une problématique non pas seulement indienne mais bien universelle, l’objectif est de réunir en 2020 partout dans le monde 1 million de marcheurs pour une seule et même cause. En parallèle, 100 marcheurs indiens gagneront en 15 mois Genève depuis Delhi, pour donner une voix à leur cause auprès des Nations Unies.

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