Apéro thématique « Agroécologie et Éducation »

C’est avec engouement que le public a participé ce 22 Juin à notre 24 ème Apéro Thématique sur l’« Agroécologie et l’éducation : Quels enjeux ? Quelles perspectives ? ». Nous avons pu compter sur un constat général et précis à la question de l’éducation publique par Isabelle Gaborieau (Chargée de mission pédagogie-Agroécologie pour la bergerie Nationale, appui à l’enseignement agricole technique) et de l’exemple associatif de la Ferme Ste Marthe avec Jean-Yves Fromonot (Ethno développeur, responsable pédagogique de la « formationsbio », ferme st-Marthe, conseiller entreprise autour du bio et de l’éthique). Le débat fertile a apporté solutions pratiques et pistes de réflexions à un public venu y voir un peu plus clair dans les programmes éducatifs agricoles. 

Le constat français: un besoin de plus d’agriculteurs et d’une production plus saine  

Aujourd’hui en France, l’agriculture occupe plus de la moitié du territoire national avec 28 millions d’hectares consacrés aux activités agricoles. Avec une production de 66 milliards d’euros en 2012, elle est le plus grand exportateur de l’Union Européen. Cependant, ce modèle agricole conventionnel montre ses limites : perte de la biodiversité, destruction des sols, disparition des agriculteurs (qui ne représentaient que 3% de la population française en 2013), pollution des eaux… La France est aujourd’hui le pays qui utilise le plus de pesticide en Europe et le troisième au niveau mondial derrière les Etats-Unis et le Brésil. Ainsi, il devient nécessaire d’adopter des pratiques agricoles dites « agro-écologiques » ; plus durables et plus respectueuses de l’environnement.

Selon l’étude « Ambition bio 2017 » réalisée par le Ministère de l’Agriculture, l’Agroalimentaire et de la Forêt, l’agriculture biologique  serait en plein essor passant de 20 600 exploitations en 2010 à plus de 25 000 en 2013, soit une augmentation supérieure à 20 %.

L’éducation comme moteur du changement

C’est pourquoi nous avons souhaité réfléchir autour des questions suivantes : quelle est la place de l’agroécologie dans le cadre de l’enseignement agricole publique aujourd’hui en France ? Qu’en est-il au niveau associatif ?

Du coté du Public

L’enseignement agricole, qui dépend du Ministère de l’agriculture, l’Agroalimentaire et de la Forêt, propose des formations pour les jeunes à partir de la 4ème et ce, jusqu’à certaines études supérieures courtes (Bac pro, BTS…). La formation comprend un enseignement théorique et pratique grâce à la présence d’exploitations et d’ateliers technologiques. Cette formation s’est donnée pour missions de permettre l’insertion sociale, scolaire et professionnelle des élèves, de proposer des animations rurales pour développer les territoires, le tout dans une vision de coopération internationale.

En avril 2014, le ministre Stéphane Le Foll lance le plan «  enseigner à produire autrement » dans le cadre de la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt. L’objectif : une performance à la fois économique, environnementale et sociale des exploitations agricoles françaises. Ainsi, avec l’aide de la Direction Régionale de l’Alimentation, de l’Agriculture et de la Forêt (DRAAF), les référentiels et les pratiques pédagogiques ont été revisités pour mieux s’adapter à la transition agro-écologique avec, pour chaque région, une personne référente (généralement un enseignant).

Ces directions régionales permettent de renforcer le fonctionnement en réseau des établissements, des exploitations et des ateliers  permettant ainsi d’élargir leur utilisation pédagogique.  A ce jour, seule une partie des terres utilisées pour l’enseignement agricole est agro-écologique, mais le but est de pouvoir les y amener toutes dans les années à venir.

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Des applications aléatoires

Malgré cette bonne dynamique de changements, des difficultés subsistent. En effet, même si les programmes ont été revisités par la DRAAF, ils restent tout de même établis au plan national et les référentiels sont constamment revisités et négociés entre la profession (syndicats majoritaires) et les enseignants.  De plus, leurs appropriations par les enseignants divergent, notamment concernant les exploitations, en fonction des régions et de leurs mœurs.

Il faut savoir aussi que seulement 10% du programme est consacré à l’agriculture biologique. Il n’y a pas de « spécialité agro-écologie», le but étant que tout enseignant puisse en parler à ses élèves. Survient alors  la question du «Comment enseigner ?». L’enseignant a le choix entre suivre le programme à la lettre ou l’aborder avec ses élèves par des questionnements sur la pratique. De plus, il peut arriver que les professeurs ne soient pas au clair sur les différents modèles agro-écologiques. En effet, on ne parle pas là d’un savoir uniforme mais d’un panel de possibilités (monoculture, permaculture etc.). D’où l’importance de la transition didactique : quels savoirs sont nécessaires pour ces élèves sachant que le doute et l’incertitude sont parties intégrantes de ce domaine ? L’enseignant se doit dans tous les cas d’être prudent face aux jeunes pour qui la conception de l’agro-écologie peut être très variable. Par exemple, une approche militante peut brusquer et s’avérer inefficace, mais la neutralité enseignante est aussi souvent difficile à adopter en fonction des élèves, de la région, des idées. En effet, l’agriculture est pour beaucoup une affaire de famille où les aînés ont travaillé selon un modèle agricole conventionnel et industriel. Face à cela, les mots «  bio » et « écologie » peuvent faire peur ou provoquer de l’incompréhension. Selon notre intervenante, ils doivent donc être utilisés avec prudence.

C’est pourquoi il est important de problématiser la question de l’agro-écologie pour éviter de stigmatiser. Le lien agriculture/santé peut parfois aider. On propose d’ailleurs une semaine de stage Education/développement durable/santé aux étudiants Bac pro. Cependant, cette question de la santé est aussi délicate quand on s’adresse à des jeunes, qui peuvent bien souvent se sentir « invincibles ». Il faut savoir aussi que l’image du métier est aussi bien souvent compliquée pour ces derniers. Néanmoins, on peut sentir un changement dans les idées chez les élèves qui se sentent plus concernés, plus sensibles, depuis ces 5 dernières années.

Côté associatif, l’exemple de la ferme Ste Marthe

Pour les personnes qui se sont, par exemple, engagées dans une voie autre que celle de l’agriculture mais qui souhaite se former ou se reconvertir, il existe des associations comme la ferme Ste-Marthe. Cette dernière accueille de nombreux citadins, des urbains, désireux de se former en agriculture bio et ses filières selon le principe « il faut se développer selon les lois de la nature ».

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La formation comprend 3 étapes :

  • La formation générale où l’on apprend sur le terrain à créer son activité, à cultiver, à connaître les plantes. Elle est d’une durée de 50 jours. Elle peut être financée par des fonds publics sur dossier. Elle sera moins chère si financée sur fonds personnels.
  • Si les personnes ne se sentent pas assez en confiance pour commencer leur projet (une micro-ferme par exemple) à la fin de cette première étape, un module de 50  jours en apprentissage chez un maraîcher est possible. Cependant, celui-ci ne pourra être financé par des fonds publics et est par conséquent plus difficile d’accès.
  • Enfin, une formation au « Bec Hellouin» en permaculture est souvent recommandée pour clôturer cet apprentissage.

Il faut savoir que la formation seule en permaculture ne peut suffire à devenir agriculteur.

Cette formation permet d’obtenir un diplôme privé. Il est préférable de passer le Brevet Professionnel Responsable d’Exploitation Agricole (BPREA) qui prépare à l’installation en agriculture et aux emplois de responsable d’atelier d’élevage ou de culture ou au moins d’avoir une expérience professionnelle pour être sûr que la voie dans laquelle on s’engage nous correspond vraiment.

De plus, un diplôme d’état facilite l’accès à la terre. En effet, il arrive que des personnes engagées dans la formation avec beaucoup d’envie déchantent devant les nécessités administratives de la Politique Agricole Commune (PAC) par exemple, ou la difficulté d’acquisition de terres. Elles se réorientent alors sur des projets tels que les micro-fermes, les fermes pédagogiques, la distribution (AMAP). Cependant, il faut savoir que des réseaux comme l’association pour le développement agricole et rural (ADAR) peuvent accompagner les nouveaux agriculteurs qui démarrent et les aider grâce à des programmes tels que l’Aide au développement local.

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Découvrir le projet Biofermes Internationales…

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En partenariat avec la Fondation Ekibio, nous proposons lors de nos Apéros thématiques
une dégustation de produits issus du commerce équitable, dans le respect d’une agriculture familiale et biologique.

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