L’importance des savoirs paysans pour la transition agroécologique

Décembre 2021

Alors que notre système agricole et alimentaire est confronté à des défis d’ordre économiques, environnementaux, territoriaux, et sociaux, nous avons pourtant besoin de paysans et paysannes nombreux·ses, qui assurent une alimentation saine et variée pour l’ensemble de la population, tout en développant des pratiques respectueuses du vivant et de son environnement.

Un monde rural touché par une crise sans précédent : la disparition à venir des paysan·ne·s

Nous faisons aujourd’hui face à une baisse continue du nombre d’agriculteurs et d’agricultrices en France. En effet, alors que des centaines de milliers d’agriculteurs seront en âge de partir à la retraite dans les années qui viennent, le rythme actuel d’installations ne permet pas de compenser ces départs. La forte diminution du nombre d’exploitations en témoigne : chaque semaine, ce sont environ 200 fermes qui disparaissent, et les statistiques prévoient une diminution de 30% du nombre d’exploitation d’ici 2025, par rapport à 2010. Or, la disparition des paysan·ne·s va de pair avec celle de modèles familiaux fortement ancrés sur les territoires et dans les dynamiques locales, et qui sont fondés sur des pratiques adaptées au monde vivant. Ces modèles familiaux sont le fruit de savoirs et savoir-faire développés progressivement par les paysan·ne·s eux-mêmes, et transmis de génération en génération.

Alors que notre système agricole et alimentaire est confronté à des défis d’ordre économIMG_20200629_122735-miniques, environnementaux, territoriaux, et sociaux, nous avons pourtant besoin de paysans et paysannes nombreux·ses, qui assurent une alimentation saine et variée pour l’ensemble de la population, tout en développant des pratiques respectueuses du vivant et de son environnement. Dans ces circonstances, la valorisation des savoirs locaux et des savoir-faire paysans semble donc essentielle pour développer des systèmes agricoles fondés sur des pratiques spécifiques et adaptées au contexte dans lesquelles elles s’inscrivent.

Ainsi, nous avons plus que jamais besoin d’assurer la transmission de ces pratiques entre paysan·ne·s d’aujourd’hui et de demain, gage de campagnes dynamiques au sein desquelles la protection de l’environnement, les initiatives citoyennes responsables et les savoir-faire agroécologiques sont valorisés.

 

Nos partenaires

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La FADEAR (Fédération Associative pour le Développement de l’Emploi Agricole et Rural) rassemble 67 associations qui font vivre les valeurs de l’Agriculture paysanne au sein des territoires et accompagnent notamment les porteur·se·s de projet dans leurs parcours vers l’installation.

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L’association Terre de Liens a pour ambition de favoriser l’accès des paysan·ne·s à la terre, promouvoir des projets citoyens pour dynamiser les territoires ruraux, et permettre le développement d’une agriculture respectueuse de l’environnement.

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Les CIVAM (Centres d’initiatives pour valoriser l’agriculture et le milieu rural) sont des groupes d’agriculteurs et de ruraux qui se réunissent pour réfléchir ensemble à la transition agro-écologique.

 

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Le RENETA (Réseau National des Espaces-Tests agricoles) rassemble un ensemble de structures qui permettent aux porteur·se·s de projet de s’installer progressivement grâce au test agricole.

 

logo-crefad Le Réseau des Crefad (Centre de Recherche, d’Etude, de Formation à l’animation et au Développement) est une fédération de 16 associations d’éducation populaire qui œuvrent en réseau pour construire et agir ensemble autour de thématiques d’action diverses, notamment en milieu rural.

 

Valoriser les pratiques paysannes dans les parcours à l’installation

Le projet Passerelles paysannes est né d’un constat partagé par nos organisations : les savoirs locaux et paysans sont aujourd’hui trop peu valorisés auprès des porteurs·se·s de projet dans les parcours à l’installation. Peu d’entre eux ont l’occasion d’aller s’immerger sur des fermes, au contact de paysan·ne·s désireux·se·s et disponibles pour transmettre leur expérience et leurs savoir-faire. C’est face à cela que nous développons un parcours de « compagnonnage paysan », qui donne l’opportunité à des futur·e·s paysan·ne·s de se former au sein de fermes sur lesquelles ils seront accompagné·e·s par des paysan·ne·s expérimenté·es, qui dédient chaque semaine un peu de leur temps pour les appuyer dans la concrétisation de leurs projets.

 

HD_Projet Micro Fermes_Sainte_Marthe-103-min-minFondé sur l’itinérance au sein de plusieurs fermes d’un réseau constitué par SOL et les ADEARs localement, le compagnonnage paysan entend donner à chacun·e l’opportunité d’approfondir ses connaissances, de renforcer ses compétences et d’avancer vers la concrétisation de son projet aux côtés de différents paysan·ne·s, dans différents contextes, en se confrontant ainsi à une diversité de manières de faire l’agriculture.

La possibilité, pour les futur·e·s paysan·ne·s, de suivre de tels parcours semble d’autant plus importante qu’aujourd’hui, la majorité de celles et ceux qui aspirent au métier de paysan·ne n’ont pas grandi dans le milieu agricole. Par conséquent, ils n’ont pas hérité de savoirs et savoir-faire transmis par leurs parents et ont donc besoin de se plonger dans la réalité du métier de paysan·ne pour préciser et confirmer leur projet d’installation. Nous considérons donc qu’il est important qu’ils bénéficient de l’expertise de celles et ceux qui nous nourrissent aujourd’hui, expérience qui leur permet en outre d’apprendre, par eux-mêmes, à développer leur autonomie en mobilisant des savoirs et leur capacité d’innover en matière de pratiques agricoles.

 

Dans le cadre de Biofermes, 84 futur·e·s paysan·ne·s ont été accueilli·e·s dans le cadre de stages au sein des fermes du réseau que nous avons constitué, aujourd’hui, 46% d’entre elle·eux sont installé·es, dont Nicolas :

« C’est toujours intéressant d’aller sur différentes fermes, de voir différentes manières de produire, différentes tailles de ferme. Il faut se poser toutes les questions : pourquoi il·elle cultive de cette manière, pourquoi il·elle utilise tel outils, pourquoi il·elle·s font comme ci, comme ça, ou pourquoi ils ont fait différemment d’un autre producteur·ice ou maraîcher·ère chez qui on est allés. »

Nicolas Rozier, formé dans le cadre du projet Biofermes, a ensuite créé la ferme Les Jardins du Rozier à Montélimar – 2021

 

Une source de savoirs essentielle dans un contexte de transition

Complémentaires d’autres formes de savoirs, notamment scientifiques, verbalisés et enseignés dans le cadre des formations agricoles classiques, les savoir-faire paysans sont, pour SOL et ses partenaires, indispensables pour favoriser la transition vers une agriculture écologique, citoyenne, et durable.

En effet, les savoirs locaux sont le fruit d’observations et d’ajustements de pratiques, par l’expérience et sur un temps long. Ils ont été développés dans un contexte particulier et adaptés aux caractéristiques du territoire et à ses évolutions. Ils sont ainsi plus susceptibles d’être le produit d’un travail du paysan avec la nature et non contre elle : les paysans développent leur activité agricole en fonction des potentialités du territoire et l’adaptent donc selon les caractéristiques de son environnement. Le rôle de l’agriculteur comme acteur essentiel des systèmes de production prend alors tout son sens : en ayant conscience des interactions avec son écosystème, il maîtrise davantage d’étapes de la production alimentaire. Il parvient ainsi à développer des pratiques qui permettent à la fois la productivité des systèmes et la durabilité des ressources mobilisées pour produire, ce qui garantit sa propre autonomie.

En effet, en fondant leurs pratiques sur l’adaptation au vivant et à son environnement, les paysans se démarquent ainsi des logiques et circuits qui contraignent l’activité des agriculteurs, réduisent leur marge de manœuvre dans le développement de leurs pratiques et leur imposent des coûts importants d’approvisionnement en intrants externes. Par exemple, la préservation et la reproduction des semences paysannes constituent une alternative à l’achat de semences commerciales, coûteuses et aux conséquences néfastes pour notre santé et l’environnement.

 

IMG_20170918_151120-minEn même temps, la capacité d’un paysan à développer ou mobiliser des savoirs issus de pratiques ancrées localement est un atout indispensable pour assurer sa résilience face à l’instabilité croissante des écosystèmes et du climat. Ainsi, la sélection variétale par les paysan·ne·s permet de cultiver des variétés de semences adaptées aux conditions locales, plus résistantes face aux aléas climatiques, et qui présentent en outre des vertus nutritives plus importantes que les semences commerciales.

 

module 2 (2)-minPour finir, le partage d’expériences entre paysan·ne·s ou entre paysan·ne·s et futur·e·s paysan·ne·s permet de stimuler les échanges et le co-apprentissage entre pairs, ce qui encourage le développement des réseaux et des dynamiques territoriales, essentiels au dynamisme du monde rural et au bien-être de ceux qui nous nourrissent. En ce sens, la reconnaissance des savoirs que les paysan·ne·s détiennent et développent est essentielle car elle renforce la place des paysan·ne·s dans la société et peut ainsi faciliter le dialogue entre acteur·ices d’un même territoire.

 

Ainsi, en donnant un rôle crucial à la préservation et à la transmission de savoir-faire des paysan·ne·s, nous œuvrons également en faveur de la valorisation du rôle des paysan·ne·s dans la société et du dynamisme des zones rurales, le tout au service de la transition agricole et alimentaire.

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Pour aller plus loin :