Biofermes Sénégal : retour sur 3 ans d’actions en faveur d’un modèle agroécologique résilient

Février 2022

Alors que le projet Biofermes Sénégal entre dans une nouvelle phase, il est temps pour nos équipes et celles de notre partenaire local, l’ONG des Villageois de Ndem de faire le bilan de ces dernières années d’actions en faveur de la transition agroécologique et paysanne dans la région semi-aride de Louga. 

Agir pour soigner la terre et les peuples

Face aux constats que SOL et l’ONG des Villageois de Ndem ont pu faire et aux besoins constatés, il était essentiel de construire un projet permettant d’accompagner les communautés rurales sénégalaises vers une agriculture plus respectueuse de la nature et des êtres humains et permettant ainsi aux paysans et aux paysannes d’être plus résilients face aux crises qu’ils pouvaient rencontrer mais aussi, assurer pour leurs familles et leurs villages, l’accès à une alimentation saine, locale et autonome.

En effet, car au Sénégal, l’agriculture occupe près de 70 % de la population active et l’agriculture familiale représente 95 % des exploitations (IPAR, L’agriculture familiale au Sénégal (ipar.sn), 2013). Toutefois, ces fermes souffrent de l’épuisement des sols et du surendettement lié notamment au développement d’une agriculture reposant sur la monoculture pour l’exportation de cultures de rente et l’utilisation d’intrants chimiques. Ces difficultés sont aggravées par les changements climatiques, par lesquels la région de Louga est particulièrement impactée, et qui se traduisent notamment par une sécheresse persistante et une perte de biodiversité. 

Créer une ferme agroécologique en milieu extrême : un défi réussi !

Créer une ferme milieu extremeFace à ces constats, SOL et l’ONG des Villageois de Ndem ont décidé de mettre en place un projet fou : celui de créer une ferme agroécologique d’expérimentation, de formation et de production en pleine zone semi-aride, située dans le village de Mbacké Kadior, dans la région de Louga. Cette ferme construite sur un terrain vide, quasi-désertique a pour mission de montrer que les techniques agroécologiques sont possibles dans un contexte aussi extrême et comprend des activités diverses allant du maraîchage, à l’arboriculture, en passant par l’élevage, ou encore à la préservation des semences à la transformation alimentaire. Aujourd’hui, la ferme fonctionne, forme et bénéficie aux populations locales.

Ainsi avec la création de cette ferme modèle de formation et de production, le projet permet de diminuer la dépendance alimentaire des communautés locales au marché extérieur, notamment pour les légumes, le poisson et la volaille. 

De plus, le forage solaire, réalisé pour que la ferme puisse disposer d’eau potable bénéficie au quotidien à près de 180 personnes et permet à plus de 30 paysannes et paysans d’utiliser le système d’irrigation pour leurs parcelles maraîchères. 

Former et accompagner les paysannes et paysans dans leur démarche de transition

En s’appuyant sur la ferme modèle créée, les actions visent avant tout à former et à transmettre les techniques d’agroécologie et de sensibiliser les populations locales sur les enjeux liés à la préservation de l’environnement.

C’est ainsi que nous avons commencé par former 8 animateurs locaux pour renforcer leurs connaissances sur les techniques agroécologiques et leur permettre de former à leur tour d’autres personnes. Les formations se sont déroulées au sein de la ferme mais également sous forme de visites d’expérience auprès d’autres fermes agroécologiques présentes dans d’autres zones du Sénégal. En tout, 4 visites de fermes impliquant les 8 animateurs, 18 paysan.nes ont été organisées et ont permis aux animateurs et aux paysan.nes d’échanger sur les savoirs et savoir-faire agroécologiques au Sénégal. Former et accompagner

En parallèle, les paysannes et paysans sont formés aux techniques et pratiques maraîchères et arboricoles. En fin de phase 1, des femmes ont pu commencer un apprentissage autour des pratiques allant de la graine à la transformation. Durant la phase 2, elles commenceront à apprendre la commercialisation de leurs produits.

Par exemple, 100 paysannes ont été formées et maîtrisent désormais les techniques arboricoles de base pour mieux comprendre l’importance des arbres et l’intérêt qu’ils représentent pour la sécurité alimentaire de leur famille et pour la création de revenus complémentaires. 

Ce sont aussi 21 parcelles maraîchères qui ont été aménagées et équipées et mises à disposition de 100 femmes formées à l’arboriculture et 40 paysan.nes formé.es au maraîchage, afin qu’ils puissent expérimenter les techniques apprises et bénéficier des produits cultivés grâce au système d’irrigation auquel ils ont accès. L’accompagnement de 30 femmes transformatrices dont la formation a débuté en fin de phase 1 et continuera en phase 2, auront prochainement accès à ces 21 parcelles maraîchères. Un accompagnement qui permet déjà à la moitié des personnes suivis d’augmenter leur revenu de près de 10 %.

Créer du lien pour une revalorisation du rôle des paysan.nes et sensibiliser sur les enjeux agricoles et climatiques

Créer du lienUn autre enjeu d’importance du projet est de revaloriser le rôle des paysan.nes et de sensibiliser les citoyens d’aujourd’hui et de demain aux enjeux climatiques et agricoles. Dans cette idée, ce sont 465 élèves et étudiant.es qui ont été sensibilisés aux enjeux et aux principes de base de l’agroécologie au sein des écoles et près de 170 collégiennes et collégiens d’établissement locaux qui ont pu être suivi spécifiquement sur les principes agroécologiques grâce au programme Eco-Jeunes Solidaires. Et plus de 220 élèves et 600 visiteur.euses qui ont été accueilli sur la ferme. Ce sont aussi 11 étudiants agronomes sénégalais  qui ont été accueillis à la ferme, dans le cadre d’un stage, pour augmenter leurs connaissances  au sujet de l’agroécologie.

Au total, cette première phase du projet a permis de sensibiliser 5 000 personnes sur ces enjeux au Sénégal et en Europe à travers des animations diverses comme des vidéos, des jeux, des outils pédagogiques ou encore des conférences.

Rechercher et partager nos résultats et nos expériences

La ferme est un espace d’expérimentation qui permet déjà aujourd’hui de partager des résultats utiles et éclairants pour la région. C’est ainsi que près de 50 variétés de semences arboricoles et maraîchères adaptées à la zone ont été identifiées. Elles sont aujourd’hui répertoriées, conservées dans la case de semences et reproduites dans la pépinière de la ferme.

Dans une idée de partage, les expérimentations se font également avec d’autres actrices et acteurs de l’agroécologie au niveau sénégalais et ouest-africains. Avec le développement d’un tel réseau d’échanges dépassant le cadre géographique du projet, 10 expérimentations agroécologiques culturales et 10 techniques ont été documentées et pourront ainsi être diffusées auprès d’autres acteurs de l’agroécologie. En parallèle, notre partenaire local, l’ONG des Villageois de Ndem participe à des rencontres et ateliers inter-acteurs au niveau du Sénégal pour la promotion de l’agroécologie et d’échanges sur la transition agricole.

Pérenniser et renforcer notre action avec la phase 2 du projet

Aujourd’hui, Biofermes Sénégal entame une nouvelle phase de son développement ! Les objectifs de cette nouvelle phase visent notamment à renforcer les capacités et l’organisation de la ferme pédagogique dans une perspective d’autonomisation de la structure et de ses animateurs. Nous poursuivons le développement du périmètre de production en renforçant la formation et l’accompagnement des paysan-nes sur la production, la transformation et la commercialisation locale de leurs produits. Nous continuons nos actions d’accompagnement avec 250 paysannes supplémentaires installées sur 3 périmètres agroécologique créés à leur initiative autour de Ndem et Mbacké Kadior. Nous poursuivons et élargissons également les activités de sensibilisation à destination des enfants, des jeunes, des paysan-nes et des consommateurs-rices de la région et à renforcer les liens entre la ferme de Mbacké Kadior et les divers acteurs de l’agroécologie au niveau national.

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